YINKA SHONIBARE
SAFIOTRA
[HYBRIDITÉS/HYBRIDITIES]

ANTANANARIVO
11 AVRIL 2025 - 21 MARS 2026

Du 11 avril 2025 au 21 mars 2026, la Fondation H invite l’artiste britannico-nigérian Yinka Shonibare pour une carte blanche intitulée Safiotra [Hybridités/Hybridities], sa première exposition majeure sur le continent africain. L’exposition occupe les 2 200m2 du bâtiment de la Fondation H dans le centre-ville d’Antananarivo.

L’exposition monographique présente des œuvres couvrant une quinzaine d'année de la carrière de Shonibare, notamment The African Library (2018), une œuvre de la collection permanente de la Fondation H. Cette installation monumentale comprend 6 000 livres enveloppés d’un tissu imprimé en wax hollandais, dont la moitié est estampillée du nom d’une personnalité qui a façonné l’Afrique postcoloniale. L’installation est complétée par une interface digitale fournissant des informations historiques et biographiques sur ces personnalités.

L’exposition présente également une série de sculptures emblématiques de Yinka Shonibare, telle que Refugee Astronaut X (2024), créée par l’artiste dans le contexte de Madagascar. Elle comprend également des œuvres des séries Hybrid Mask et Hybrid Sculpture, trois œuvres de la série Decolonized Structures issues de l’exposition personnelle de Yinka Shonibare en 2024 à la Serpentine (Londres), ainsi que des œuvres antérieures telles que Alien Man on Flying Machine (2011) et Alien Woman on Flying Machine (2011).

Safiotra [Hybridités/Hybridities] est enrichie d’une sélection d’œuvres de la collection de la Fondation H, sous le commissariat de Shonibare. Cette sélection présente des œuvres de 19 artistes, dont notamment Kelani Abass (Nigeria), Malika Agueznay (Maroc), Amina Agueznay (Maroc), El Anatsui (Ghana), Leilah Babirye (Ouganda), Virginia Chihota (Zimbabwe), Jems Koko Bi (Côte d’Ivoire), Abdoulaye Konaté (Mali), Ibrahim Mahama (Ghana), Zanele Muholi (Afrique du Sud), Ouattara Watts (Côte d’Ivoire/États-Unis) et Madame Zo (Madagascar). Le dialogue curatorial mis en place entre les deux expositions s’intéresse à la construction de l’histoire africaine depuis les indépendances.

La Fondation H organise par ailleurs tout au long de l’année une série d’événements et d’activités pour le public malgache. Lors de l’ouverture de l’exposition, les 11 et 12 avril 2025, est proposé un programme de discussions et de performances, auxquels participeront des personnalités locales et internationales. Durant l’année, tous les samedis de 14h à 16h, la Fondation H accueille des événements publics, dont des conférences, des ateliers, des performances et des projections. Des visites et ateliers sur mesure sont organisés toute l’année pour des publics spécifiques, tels que les enfants de 6 à 14 ans (par le biais de partenariats avec des écoles publiques et organismes d’aide à l’enfance) et les visiteur.euses en situation de handicap, avec notamment des visites accessibles en langue des signes malgache ou sous forme adaptée à différents types de handicaps mentaux, en collaboration avec les ONG partenaires.

Un partenariat a également été mis en place entre la Fondation H et G.A.S. Foundation, une fondation créée par l’artiste en 2019 au Nigeria. Prenant The African Library comme point de départ, la Fondation H et G.A.S. Foundation proposent un programme de résidence croisée réunissant Antananarivo et Lagos.

Un catalogue d’exposition accompagne Safiotra [Hybridités/Hybridities], publié en septembre 2025 par la Fondation H. Le catalogue trilingue (français/malgache/anglais) comprend des vues d’expositions, des photographies d’œuvres et cinq textes inédits, dont des contributions de Gus Casely-Hayford (Directeur du V&A East, Londres) et Pr. Tiana Razafindratsimba Dominique (Experte en sciences du langage et interculturalité, Université d’Antananarivo).

Vue de l'exposition Safiotra [Hybridités/Hybridities] de Yinka Shonibare, 2025© Fondation H
INTERVIEW DE YINKA SHONIBARE
SAFIOTRA [HYBRIDITÉS/HYBRIDITIES]

Le mot malgache « safiotra » se traduit par l’idée d’hybridation, de fusion de deux éléments ou identités qui créent une nouvelle entité tout en préservant leurs caractéristiques distinctes. Appliqué aux humains, il désigne une personne d’héritage mixte qui intègre des éléments des deux origines sans être confinée à l’une ou l’autre. Cette notion s’étend aux objets ou idées nés de la convergence de réalités contrastées.

L’hybridité est au cœur de l’œuvre de Yinka Shonibare, qui explore les croisements entre cultures, identités, géographies et histoires coloniales. Né à Londres et ayant grandi au Nigeria, Shonibare incarne et questionne cette hybridité dans son travail, mêlant références visuelles et historiques occidentales et africaines. Cette dualité, ancrée dans son expérience personnelle, se traduit par des œuvres qui interrogent la place de l’individu dans un monde globalisé où les cultures s’interpénètrent, tout en maintenant certaines tensions.

L’utilisation des tissus wax, emblématique de son œuvre, illustre particulièrement cette hybridation. Ces étoffes, issues d’un parcours complexe entre l’Indonésie, leur pays d’origine, l’Europe, où elles sont massivement produites depuis des décennies, et l’Afrique, où elles sont principalement consommées, reflètent des échanges culturels, historiques et économiques complexes.

Shonibare recontextualise également des moments clés de l’histoire occidentale, comme dans la série Decolonised Structures (2022-2023), en y intégrant des éléments symboliques non occidentaux, soulignant ainsi l’interdépendance entre l’Europe et les anciennes colonies. Son esthétique baroque et contemporaine mêle styles et époques pour révéler la richesse des identités composites.

À travers son œuvre, Shonibare fait de l’hybridité un espace de dialogue entre les cultures, dissolvant les oppositions traditionnelles (Ouest/Est, passé/présent, local/global) pour célébrer le métissage comme source de créativité et de réflexion sur notre monde contemporain.

L’exposition Safiotra [Hybridités/Hybridities] présente trois œuvres de Yinka Shonibare issues de la collection de la Fondation H : The African Library (2018), Refugee Astronaut X (2024) et African Bird Magic (Mauritius Fody & Comoro Blue Vanga) (2024), ainsi qu’une vingtaine de ses œuvres datant de 2011 à 2024.

The African Library : une œuvre majeure de l’exposition Safiotra

The African Library (2018) est l’une des installations les plus marquantes de Yinka Shonibare à ce jour. Cette œuvre s’inscrit dans un projet international de l’artiste, qui comprend à ce jour quatre bibliothèques. Réalisée sur plusieurs années, cette série interroge la construction et l’écriture de l’histoire de trois continents : The British Library (2014), aujourd’hui conservée dans la collection permanente du Tate Museum, The American Library (2018), appartenant à la Rennie Collection, The African Library (2018), désormais intégrée à la collection de la Fondation H , et The War Library (2024), présentée lors de l’exposition monographique de l’artiste à la Serpentine (Londres) en 2024.

The African Library se compose de six mille livres recouverts de tissu wax hollandais et marqués des noms de personnalités ayant façonné l’histoire africaine durant la période postcoloniale. La bibliothèque rassemble ainsi diverses figures ayant joué un rôle significatif dans les luttes pour l’indépendance des colonies européennes en Afrique. Elle accorde une attention particulière aux femmes et aux alliés européens ayant soutenu ces luttes pour l’émancipation africaine. Elle met également en lumière des Africains célèbres dans des domaines tels que la littérature, la science, le sport, la musique et l’art.

L’installation est complétée par un dispositif numérique permettant au public d’accéder à des ressources historiques et biographiques sur ces personnalités via un site web répertoriant les biographies de 6 000 figures majeures. Dans le cadre de l’acquisition de cette œuvre majeure, la Fondation  H a entrepris un travail d’enrichissement de ce corpus, incluant la traduction de toutes les entrées en anglais vers le français, ainsi que certaines en malgache. Le site web a également été repensé par la Fondation H afin de faciliter l’exploration des ressources proposées, avec une navigation par entrée géographique, thématique et alphabétique, rendant ainsi cette œuvre accessible au vaste public, principalement malgache, de la Fondation H.

 Une sélection d’œuvres de la collection de la Fondation H en dialogue avec les œuvres de Yinka Shonibare

L’artiste Yinka Shonibare, invité pour une carte blanche intitulée Safiotra [Hybridités/Hybridities], propose une lecture de la collection de la Fondation H en dialogue avec son exposition monographique. Sa sélection réunit 19 artistes africain·es et afro-descendant·es, de sa génération et de celle qui la suit. À travers la diversité des médiums : la peinture, la sculpture, l’installation et le textile, ces artistes déconstruisent les notions d’identité figée – pure/authentique – pour proposer une vision fluide/hybride et en perpétuelle mutation du monde. Ces artistes interrogent dans leurs pratiques les croisements entre le savoir-faire traditionnel et une création radicalement contemporaine, l’invocation de la mémoire et les transformations du monde contemporain, la matérialité et le conceptuel.

L’exposition met en lumière l’importance de la matérialité dans l’art contemporain sur le continent africain, où les matériaux deviennent des vecteurs de mémoire, d’écriture, de revendication et de résistance. Chaque œuvre témoigne d’une interconnexion entre l’histoire des matériaux, leur origine, leur transformation et les récits qu’ils portent, interrogeant ainsi les notions d’héritage, de durabilité et de mondialisation. Cette exposition invite le public à un voyage esthétique et intellectuel, où chaque œuvre devient un pont entre le passé et l’avenir, entre les ressources de la terre et les aspirations humaines, tout en questionnant notre propre relation aux matériaux et leurs implications à l’échelle mondiale.

Les artistes exposé·es

Kelani Abass (Nigeria), Malika Agueznay (Maroc), Amina Agueznay (Maroc), El Anatsui (Ghana), Omar Ba (Sénégal), Leilah Babirye (Ouganda), Virginia Chihota (Zimbabwe), Sokey Edorh (Togo), Dan Halter (Afrique du Sud), Jems Koko Bi (Côte d’Ivoire), Abdoulaye Konate (Mali), Ibrahim Mahama (Ghana), Zanele Muholi (Afrique du Sud), Moataz Nasr (Egypte), Zoarinivo Razakaratrimo (Madagascar), Moffat Takadiwa (Zimbabwe), Temandrota (Madagascar), Ouattara Watts (Côte d’Ivoire) Billie Zangewa (Malawi).

BIOGRAPHIE DE YINKA SHONIBARE

Yinka Shonibare CBE RA (né en 1962) est un artiste britannico-nigérian reconnu pour son travail interdisciplinaire, abordant des thèmes liés à l'identité culturelle, au post-colonialisme et à la mondialisation. Il a étudié les Beaux-Arts à la Byam Shaw School of Art à Londres en 1989, et a obtenu son MFA à Goldsmiths, University of London, en 1991.

La pratique de Shonibare incorpore souvent des références à l'histoire de l'art et à la littérature occidentales, afin de remettre en question la légitimité des identités culturelles et nationales contemporaines dans un contexte globalisé. Son travail explore des problématiques de race, de classe et d'identité, tout en réfléchissant aux relations complexes et imbriquées entre l'Afrique et l'Europe, en particulier leurs histoires politiques et économiques.

Il a été lauréat du prix Turner en 2004 et a présenté une rétrospective de mi-carrière au Museum of Contemporary Art de Sydney en 2008, qui a ensuite voyagé au Brooklyn Museum à New York et au National Museum of African Art du Smithsonian à Washington D.C. en 2009. Une de ses commandes publiques les plus célèbres, Nelson’s Ship in a Bottle (2010), a été exposée sur le Quatrième Socle à Trafalgar Square, à Londres, et fait désormais partie de la collection permanente du National Maritime Museum à Greenwich, Londres.

En 2013, Shonibare a été élu Royal Academician, et en 2019, il a été honoré du titre de Commandeur de l'Ordre de l'Empire Britannique (CBE). La même année, son installation The British Library a été acquise par la Tate et est actuellement exposée à la Tate Modern à Londres.

Shonibare a reçu le prestigieux prix Whitechapel Gallery ArtIcon en 2021, et une rétrospective majeure de son travail a ouvert la même année au Museum der Moderne à Salzbourg. Il a également coordonné la Summer Exhibition de la Royal Academy, qui a ouvert en septembre 2021. En 2022, il a présenté son exposition personnelle Planets in My Head au Frederik Meijer Gardens & Sculpture Park dans le Michigan, et a dévoilé une nouvelle sculpture, Wind Sculpture in Bronze I, à Royal Djurgården à Stockholm.

En novembre 2022, Shonibare a lancé la Guest Artists Space (G.A.S.) Foundation, une organisation à but non lucratif dédiée à favoriser les échanges culturels à travers des résidences d'artistes et des programmes publics. La fondation est basée à Lagos et à Ijebu, dans l'État d'Ogun au Nigeria, offrant des espaces de résidence pour des créateurs du monde entier.

En 2023, la Biennale de Sharjah a commandé à Shonibare de nouvelles œuvres pour son 30e anniversaire, et il a dévoilé une nouvelle sculpture extérieure à Leeds, commandée par la David Oluwale Memorial Association dans le cadre de Leeds 2023. Ses œuvres ont été largement mises en avant lors de la Biennale de Venise 2024 dans le Pavillon nigérian avec l'exposition Nigeria Imaginary, et la Serpentine Gallery de Londres a présenté une exposition solo intitulée Suspended States.

Les œuvres de Shonibare sont présentes dans des collections prestigieuses à travers le monde, notamment à la Tate Collection, Londres ; au Victoria and Albert Museum, Londres ; au National Museum of African Art, Washington D.C. ; au Museum of Modern Art, New York ; au Moderna Museet, Stockholm ; au Museum of Contemporary Art, Chicago ; et à la Galerie nationale d'art moderne à Rome.

Portrait de Yinka Shonibare - Photographe : Fabio Thierry Andriamiarintsoa © Fondation H