ANTANANARIVO
2 AVRIL AU 23 JUIN 2024
La Fondation H a invité Charlotte Yonga pour une résidence de trois mois à Antananarivo dans le cadre de l’exposition Memoria : récits d’une autre Histoire du 2 avril au 23 juin 2024.
Dans le cadre de Memoria : récits d’une autre Histoire, Yonga présente une installation multimédia intitulée Le Grand écart réalisée de 2010 à 2017. Composée d’un portrait du chef Innocent Nayang Toukam et d’une vidéo, l’installation est une restitution de la visite de ce chef traditionnel camerounais en France en 1991. Une expérience à la fois singulière et commune, bouleversante pour un homme n'ayant jamais quitté son pays. À travers cette œuvre, l’artiste s’intéresse aux notions d'individualité, de territoire et de regard croisé Nord-Sud. Elle recentre l'objectif sur des personnes "ordinaires" qui deviennent centrales aux yeux des spectateurs.
Pour sa résidence à la Fondation H, Yonga travaille sur une troisième série photographique - après Naam Na La, série réalisée en 2021 au Sénégal, qui explore à travers des portraits, des natures mortes et des paysages, les nuances et les complexités de l’amour au sein du quotidien, des étreintes aux tourments, remettant en question les schémas amoureux soumis aux attentes et aux normes sociales ; Et la série Salt Wind développée en 2023 à Malte, qui célèbre les relations organiques et imprécises, marquées par une instabilité native, invitant ainsi à une réflexion autour de l'amour et de ses multiples expressions, parfois tangibles, parfois insaisissables - qui étend sa volonté de déplacer et de décentrer le regard. Pour elle, c’est un geste de réparation visant à élargir le champ des représentations de la figure noire, féminine et africaine. Pour Yonga, il est essentiel, « en tant que femme africaine, de nous accorder le droit, la liberté et le plaisir de nous fantasmer nous-mêmes». Une troisième série enrichie des voix malgaches, qui résonne pleinement avec le propos de Memoria : récits d’une autre Histoire : voir le monde depuis une autre perspective. Une perspective cette fois ancrée dans le contexte insulaire de la Grande Île.
À Antananarivo, elle approfondit sa recherche photographique tout en cherchant à y refléter sa découverte du territoire malgache, ses rencontres, ses textures et ses teintes. Sa démarche vise constamment à valoriser les relations interpersonnelles, qu'elles soient de nature familiale, amoureuse ou amicale, ainsi que les sentiments d'affection maternelle, fraternelle et sororale, et l'attachement au monde matériel, naturel et spirituel. Enfin, en associant des dessins abstraits à ses photographies, elle souhaite apporter une dimension psychique et introspective à l’ensemble, donnant ainsi à voir des dialogues analogiques, libres et aléatoires, sources de nouvelles intrigues visuelles et émotives.
Fuyant les visions stéréotypées attribuées au continent africain et aux personnes du Sud global, Yonga cherche à explorer les représentations manquantes, considérant ces lacunes comme un déni de la pluralité des identités. Elle souhaite par son travail contribuer à combler ces manques en créant des portraits magnétiques où les modèles de la rue (anonymes) sont saisis à travers leur densité, leur force et leur fragilité. Parallèlement, elle interroge l'expérience de l'amour en tant que construction sociale et culturelle. Dans un souci d'inventer de nouveaux récits énigmatiques, elle aime à crypter les évidences pour transcender les mémoires futures et les projections dépassées, nous invitant ainsi à choisir et à créer nos propres narrations et représentations, en assumant leur fabrication au-delà des préjugés.
BIOGRAPHIE DE CHARLOTTE YONGA
Née en 1985 à Paris, France, Charlotte Yonga est une artiste franco-camerounaise qui vit et travaille entre Barcelone, Espagne, et Paris, France. À travers son processus créatif, qui intègre photographie, vidéo et dessin, Yonga invite le spectateur à explorer des fragments inspirés du réel ; des scènes de vies intimes et d’altérités, où elle rend compte de vérités complexes. Par le biais d'un subtil jeu de va-et-vient entre réalité et fiction, elle crypte les évidences et brouille les frontières, laissant ainsi voir des significations parfois ambivalentes qui défient les limites de nos projections collectives et individuelles.